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NIPPONIA No.34 15 septembre, 2005
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Le Jardin Kenrokuen à Kanazawa, Préfecture d’Ishikawa.
Dans la moitié gauche de la photo : Ici, un véritable parapluie de cordes yuki-zuri protège pins et branches des dégâts des forts enneigements dont la région est coutumière. Ce haubanage hivernal ajoute un élément de tension à la grâce nonchalante du jardin, ce qui le rend plus beau encore.
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La joie simple de vibrer au fil des saisons
Voilà que s’annoncent les bises hivernales. Si chaque année s’amenuisent les chutes de neige, les régions septentrionales de l’Archipel, surtout celles tournées vers la Mer du Japon (où s’enregistrent les plus fortes accumulations de neige au monde) sont toujours suffisamment servies pour qu’il soit nécessaire d’abriter certains arbres des jardins sous une armature de bois judicieusement élaborée pour éviter qu’ils ne cassent sous le poids des neiges. Ces techniques, appelées yuki-zuri, créent des formes artistiques des plus intéressantes. Ainsi, les yuki-zuri de Kanazawa, où l’enneigement est toujours abondant, sont les plus belles réalisations du genre qui ont fait la réputation du lieu. Des embarcations légères sont disponibles pour apprécier ce paysage de neige depuis le ras de l’eau. Les parties de yuki-mi zaké (saké-pour-voir-la-neige) allient le plaisir du palais au régal de l’oeil.
Il n’est pas de maison ancienne, ou du moins de style traditionnel avec pièce de tatamis, qui n’ait ses shoji (porte-cloison coulissante en lattis de bois tendu de papier translucide). Mais comment admirer son jardin l’hiver en grelottant devant un shoji ouvert ? Qu’à cela ne tienne : on intégrera dans l’armature du shoji une section de vitre ordinairement tenue occultée par un petit “shoji” supplémentaire qu’il suffira de relever pour dégager la vitre et voir dehors. On inventait ainsi le yuki-mi shoji (shoji-pour-voir-la-neige).
Si les styles de vie japonais ont beaucoup évolué avec le temps, l’on retrouve toujours en bruit de fond l’intarissable source d’une tradition et de connaissances qui permettent de tirer un maximum de joies des changements saisonniers. Sakura-gari, yuki-mi shoji, un volumineux vocabulaire saisonnier se trouve à notre disposition pour cerner l’éternel devenir de la nature, ce sont les kigo.* Ces mots ajoutent encore à la richesse de la langue japonaise, outre que n’étant protégés par nul droit d’auteur, on peut les utiliser à l’envi dans ses propres écrits. Polis mille fois par les ans, ces kigo sont aujourd’hui chargés de tout le charme et de la vibrante émotion poétique qui colorent l’existence. Certes, l’on peut vivre sans, mais moins bien assurément. Ouvrages de référence, les saijiki renferment d’entières collections de ces mots, catalogués sous différentes classifications : astronomie, événements culturels, faune, flore, géographie, périodes de l’année, quotidien… Et nous, les poètes, nous nous plaisons à penser que ces saijiki sont en fait des guides sûrs vers les sensibilités et les affects des Japonais. Quoi qu’il en soit, apprendre un nouveau kigo vous livrera toujours une compréhension immédiate et intuitive des styles de vie japonais.
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* Le kigo est un mot, une formule, utilisé dans le haïku et autres genres littéraires pour produire ou invoquer des images, exprimer des émotions spécifiques à l’une des quatre saisons. Un kigo pourra donc renvoyer à un phénomène naturel, le temps, une plante, un animal, ou encore une coutume, un mets, une boisson servis précisément dans cette saison, ou même à un mois précis.
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