2014 No.13

Menu

  • pdf
  • pdf

Pour lire le livre numérique, JavaScript doit être validé sur votre navigateur et un module d'extension gratuit Flash Player d'Adobe Systems Inc. doit être installé.get flashplayer

Le Mont Fuji, symbole du Japon

3

Éco-balade dans une forêt
mystérieuse du Mont Fuji

picture

Nombreux sont les endroits sur le Fuji qui portent les traces de ses éruptions passées, comme par exemple la forêt mystérieuse d’Aokigahara Jukai, surnommée “l’Océan d’Arbres,” qui couvre les collines au nord-ouest du mont. Accompagnez-nous pour une éco-balade à la découverte de formations rocheuses étranges et de grottes trahissant une activité volcanique ancienne, ainsi que de certains végétaux particuliers—l’expression d’une nature mystérieuse liée à une montagne unique.

Photos par Natori Kazuhisa Carte compilée par Oguro Kenji

Chaque éruption du Fuji au fil des siècles a modifié la topographie environnante. Suite à l’éruption Jogan en 864, le champ de lave refroidie a formé le socle sur lequel finirait par se développer l’ “Océan d’Arbres” d’Aokigahara Jukai sur le flanc inférieur nord-ouest du mont. Cette forêt occupe actuellement une grande superficie—quelque 3000 hectares— à une altitude comprise entre 900 et 1300 mètres.

Les arbres poussent en rangs serrés et la forêt semble impénétrable. De fait, elle est si épaisse que la tradition l’a toujours trouvée effrayante et l’on prétend que les personnes qui s’y aventurent imprudemment s’y perdent à jamais. C’est peut-être pourquoi de nos jours rares sont ceux—même les gens du cru—qui s’y risquent. Mais cela est en train de changer grâce à une nouvelle compréhension de l’environnement naturel remarquable que constitue cette forêt, et à présent, elle est devenue une destination d’écobalade facile d’accès. Kuribayashi Shuki, guide nature installé dans la ville de Fujikawaguchiko, est notre cicérone aujourd’hui.

Lorsque s’est formé un champ de lave, les premiers végétaux qui repoussent sont des lichens (organismes à la fois algues et champignons). Plus tard apparaissent les mousses, puis les herbes, et ainsi, petit à petit, un substrat propice à la vie se constitue. Ce qui rend cette forêt unique au monde, c’est qu’un substrat d’à peine 10 cm d’épaisseur y parvienne à soutenir la croissance d’arbres. C’est la présence de l’Océan Pacifique, non loin au sud, qui rend cela possible. L’air océanique apporte toute l’hygrométrie nécessaire à la croissance des mousses, qui elles-mêmes retiennent suffisamment d’humidité pour permettre aux arbres de croître.

Environ 80% des arbres sont des cyprès hinoki et des pruches tous deux à feuilles persistantes. Dans le substrat peu profond qui recouvre la lave, ils sont forcés de s’enraciner à l’horizontale, et parfois les racines sont apparentes, créant un relief tourmenté. Une fois les arbres trop grands pour que leurs racines les supportent, ils tombent. C’est pourquoi tous les arbres ici ont à peu près la même taille.

à gauche : L’eau des grottes se fige en stalagmites de glace. Ces "stalagmites" sont visibles tout au long de l’année.
à droite : La transparence de la glace trahit la pureté de l’eau qui filtre depuis les entrailles de la montagne.

La caverne des vents Fuji Fuketsu, formée par le durcissement des laves. Au fond de la caverne, il n’y a pas d’éclairage. C’est pourquoi l’on ne peut s’y aventurer qu’avec un permis et accompagné d’un guide.

Sous cette couverture végétale, l’air est lourd et humide et les arbres diffusent une odeur persistante. Ils sont si serrés qu’on n’a nul besoin de parapluie en cas d’averse légère. Un véritable “sauna” agreste.

Au bout d’une demi-heure de marche sur le sentier, nous voici à la caverne des vents Fuji Fuketsu. Le souterrain est long de plus de 230 mètres et court par endroit à une profondeur de presque 20 mètres en-dessous du sol. Cette cavernes des vents s’est formée lors d’une éruption, lorsqu’une explosion de gaz dans la lave créa un vide autour duquel la lave refroidie a formé une coque.

La grotte contient de la glace, même en été. La rumeur locale prétend qu’au début de l’ère Edo (XVIIe siècle) le shogun, Tokugawa Ieyasu, se faisait apporter jusque dans sa métropole d’Edo (le Tokyo actuel) de la glace récoltée dans des cavernes des vents telles que celle-ci. Nous pénétrons à tâtons dans une cavité noire comme de l’encre et nous découvrons de la glace sur les parois et d’autres surfaces au bout d’une trentaine de mètres. Ces cristaux de glace sont formés par l’eau qui suinte contimuellement du Mont Fuji. La température polaire est le résultat de l’évaporation dans la grotte, qui produit du froid. On y enregistre −2°C au coeur de l’été, et −15°C en hiver.

Nous ressortons de la grotte et enchaînons avec l’ascension du Mont Omuro voisin. Immédiatement, le sol change sous nos pas. À Aokigahara Jukai, la lave était visible et les sentiers durs comme le béton, mais ici à Omuro, les arbres à feuilles caduques—hêtre japonais et chêne de Mongolie—règnent en maîtres, et leurs feuilles mortes accumulées au fil du temps ont produit un terreau confortable. Par-dessus le marché, le soleil brille entre les feuilles.

« Je suis amoureux du Mont Fuji. Je suis devenu guide parce que je voulais en savoir toujours plus à son sujet, » avoue Kuribayashi. « Aokigahara Jukai fait partie du Mont Fuji. Les merveilles de cette forêt, sa capacité à prospérer en dépit de tout, son côté mythique, tout cela peut se découvrir lors d’une éco-balade et j’espère sincèrement que toujours plus de gens viendront en profiter. »

Aokigahara Jukai s’est développé sous l’influence du Mont Fuji. Notre promenade nous a permis d’apprécier la beauté d’une forêt ancienne aux mille merveilles.

Les arbres à Aokigahara Jukai sont forcés d’étendre leurs racines le long de la surface du sol. Les espèces les plus courantes sont les cyprès hinoki et les pruches (ou tsugas).

Photos prises tout près d’Aokigahara Jukai, sur le Mont Omuro (altitude 1468 m), un volcan sur le flanc du Mont Fuji non loin d’Aokigahara Jukai. Le Fuji comporte nombre de volcans secondaires.
Deux photos ci-dessus : Le Mont Omuro est couvert d’espèces variées, qu’il s’agisse d’arbres à feuilles caduques comme le hêtre japonais et le chêne de Mongolie, ou de conifères comme l’épicéa “queue de tigre” natif du Japon. Une liane épaisse de vigne du Japon constitue une parfaite balançoire.
À gauche : Kuribayashi Shuki est un guide nature basé dans la ville de Fujikawaguchiko. Ses clients trouvent faciles à comprendre ses explications sur l’histoire du Mont Fuji et sur les caractéristiques uniques des arbres. « Un monde sans arbres est un monde sans humains. Tout mon discours repose sur un même leitmotiv—il faut prendre davantage soin de nos forêts. »
À droite : Les arbres immenses du Mont Omuro sont vieux de trois, voire quatre siècles.

Carte de “l’Océan d’Arbres” d’Aokigahara Jukai et de ses environs

La caverne des vents Fuji Fuketsu est un phénomène unique d’un monde naturel intact, et son accès requiert une permission (si vous faites partie d’un tour organisé, le responsable se charge de demander les permis nécessaires). Pour faciliter les visites, des infrastructures touristiques ont été mises en place à la caverne des vents Fugaku Fuketsu, ainsi qu’à la grotte de glace Narusawa Hyoketsu.

Pour en savoir plus
L'organisation Fuji Eco-tour Service (site web en japonais) propose des tours de le caverne des vents Fuji Fuketsu et du Mont Omuro, ainsi que des éco-balades sur le Mont Fuji :
http://www.fuji-eco.com/

Site touristique de Fujikawaguchiko (en chinois, anglais, japonais et coréen) :
http://www.fujisan.ne.jp/nature/