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NIPPONIA No.24 15 mars 2003
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Bon Appétit!

La Culture japonaise en cuisine

Takikomi gohan

Le régal de toute la famille

Texte : Kishi Asako, critique gastronomique
Photos : Kono Toshihiko

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Avant-plan gauche : Go-moku gohan (Riz étuvé aux divers ingrédients).
Arrière droite : Mame gohan (Riz étuvé aux petits pois).
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Une recette japonaise pour accommoder le riz nous enjoint de faire bouillir celui-ci dans un bouillon relevé d’ingrédients divers. Le plat a pour nom takikomi gohan, ou “riz étuvé aux petits légumes” (Gohan signifiant ici “riz cuit”, avec takikomi, “cuire avec adjonction d’accompagnements divers.”) Les ingrédients en question seront des légumes, et peut-être quelque viande. Ils doivent donner au riz qui se sera imprégné de leurs parfums une saveur légèrement veloutée, moelleuse, outre qu’ils égaieront également de leur farandole colorée — et ce n’est pas en cuisine japonaise, le moindre plaisir — le bol de riz. Ainsi parfumé, l’apparition de ce riz fera trépigner d’allégresse la table familiale, car les enfants l’adorent. Inutile donc, avec ce plat, de préparer beaucoup de plats d’accompagnement.
Le riz fut longtemps la denrée de base pour le Japon. Certes, il était cher jadis, si bien que pour le faire durer davantage on le cuisait souvent avec des légumes, telles que le radis daikon et des pommes de terre, ou d’autres céréales infiniment moins nobles, telles que la hie, ou faux millet (ou blé barbu de Guinée; Panicum frumentaceum) et le awa, ou millet à grappes (ou millet des oiseaux; Setaria italica).
Bref, la pratique de mélanger le riz précieux à d’autres ingrédients et de les étuver ensemble conduisit à l’établissement de différentes versions du takikomi gohan.
Comme toujours en cuisine, il est recommandé de recourir aux légumes de saison. Vous pourriez essayer par exemple des pousses de bambou au printemps, des petits pois ou des fèves de soja fraîches l’été, des châtaignes ou des champignons matsutake à l’automne, et l’hiver des huîtres. Nombreux sont les cuisiniers qui se dirigent automatiquement sur les spécialités locales pour ces ingrédients, désireux de conférer une saveur de terroir à leur plat. Ainsi, une des recettes qui fit toujours florès dans le Japon de l’Ouest demande que le riz soit étuvé avec un poisson entier, ce sera le tai-meshi (meshi signifiant également riz, mais dans son acception “repas de riz”, ici avec une daurade) ou ayu-meshi (riz avec truite ayu; Plecoglossus altivelis).
La recette pour le go-moku gohan, par contre, utilise des ingrédients disponibles partout et en tout temps. Si Go-moku signifie littéralement “cinq articles”, en fait cela veut tout simplement dire que “différents ingrédients y ont été mélangés.” Ne vous tracassez donc pas sur le nombre, ou la nature de ces derniers : il suffira de vous laisser guider dans votre choix par votre bon sens culinaire. Pour notre rubrique d’aujourd’hui, notre chef a choisi : poulet, carottes, pousses de bambou et champignons shimeji (Lyophyllum shimeji; Pleurotus ostreatus). Un succès toujours assuré auprès des Japonais.
Les cuisiniers européens ne lavent généralement pas leur riz avant la cuisson, mais au Japon, on se livre toujours à plusieurs lavages du riz jusqu’à ce que l’eau soit enfin limpide. Le riz est ensuite égoutté dans une passoire, puis enfin immergé dans son eau de cuisson où on le laissera reposer quelque temps afin de le laisser s’imbiber de son humidité avant de mettre la casserole à la flamme. Toutes ces manipulations peuvent paraître autant de corvées, mais elles rendent indubitablement le riz plus goûteux, plus tendre, et surtout lui confèrent un lustre inégalable.
Mettre la casserole à la flamme vive, porter à ébullition, dès que l’on voit fuser la vapeur, baisser aussitôt la flamme pour éviter tout débordement intempestif, puis laisser mitonner à petit feu. Tel sera toujours le secret du riz étuvé bien goûteux.
Une fois cette opération terminée, éteindre la flamme, mais laisser le couvercle afin d’empêcher la vapeur de s’échapper, car elle doit aller gonfler le riz. Lorsque les grains de riz sont replets et appétissants, retirer le couvercle afin de laisser échapper l’excédent de vapeur. Faute de quoi, le riz serait trop collant. NIPONIA
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Ces mets ont été préparés par Dozaki Nobuyoshi, chef cuisinier du restaurant Ginza Rokusan-tei. Il totalise plus de quarante ans aux fourneaux et applique toujours rigoureusement le principe de sélectionner des ingrédients d’une fraîcheur irréprochable commandés dans les régions spécialisées dans leur production. Nullement prisonnier du “carcan des traditions culinaires japonaises”, ses recettes se distinguent par leur créativité tout en mettant en évidence les saveurs naturelles des ingrédients.
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