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NIPPONIA No.29 15 juin, 2004
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Bon Appétit!

La culture japonaise en cuisine

Chanko-nabe

Ragoût énergisant pour faire grossir les sumos

Texte : Otani Hiromi, journaliste gastronomique
Photos : Kono Toshihiko

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Les saveurs des légumes, viandes et poissons se mélangent harmonieusement dans ce plat chanko-nabe. En fait, vous pourrez y intégrer tous ce que vous voudrez.
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Les lutteurs de sumo dévorent quotidiennement leur chanko-nabe pour faire de la graisse et du muscle. Nabe signifie à la fois la “marmite” et les nourritures qu’on y met à mitonner, et chanko, tout simplement le repas pris par les sumos. Dans les écuries de sumo — le lieu où vivent et s’entraînent ces lutteurs — nulle règle absolue quant à ce qui doit bouillir dans la marmite, pourvu que ce soit du bon. Les ingrédients les plus fréquents sont poulet, tofu, et beaucoup de légumes : poireau et chou chinois, le tout assaisonné d’un bouillon corsé.
Au demeurant, la cuisine japonaise présente une riche gamme de repas à la marmite servis avec le riz. Le bouillon frémissant dans la marmite posée à même la table, l’on y jette à l’aide de longues baguettes les ingrédients préalablement coupés et artistement disposés dans un grand plat voisin : exubérances de légumes, poissons ou viandes, parfois les deux. Que ce soit en famille ou entre amis, les Japonais adorent le chaleureux coude à coude convivial de ce genre de réunion “à la fortune du pot”, surtout lorsqu’il gèle dehors.
Plusieurs explications se bousculent pour l’étymologie du mot chanko. Une théorie place l’apparition du vocable à la fin du XIXe siècle, lorsqu’un sumo retraité et vieillissant prit en charge la cuisine quotidienne dans une écurie tokyoïte. Le mot pour “pépé” dans le parler populaire de Tokyo étant “tchann”, l’on suppose que les repas concoctés par ce lutteur en retraite furent appelés chanko-nabe ou la “marmite du vieux”.
Une journée de sumo commence par une longue séance d’entraînement. Et on s’empoigne, et on se télescope, et on se jette à terre des heures durant. Tout ceci consomme des énergies colossales, d’autant plus que tous ces gabarits ne font pas moins de 120kg, qui se doivent de réparer par un repas plantureux faisant à la fois office de petit-déjeuner et de déjeuner. Le premier devoir du sumo est de faire de la graisse pour gagner toujours davantage de poids, pour sortir l’adversaire, et du muscle, pour la rapidité. Ils engloutissent donc force bolées de riz. Et le chanko-nabe, qui est surtout du liquide descend admirablement bien avec le riz. La combinaison légumes-poissons-viandes plus riz, présente un équilibre nutritionnel admirable et merveilleusement digeste. Outre que ce genre de repas est très facile à préparer et à servir, puisqu’une grande marmite contient suffisamment pour l’écurie de sumos mangeant en coude à coude. Tout cela explique pourquoi le chanko-nabe est devenu essentiel dans l’univers du sumo.
Le premier restaurant de chanko-nabe fut ouvert en 1937 par un sumo descendu du ring, dans le quartier de Ryogoku, où se trouve justement la grande salle des tournois. Après la Deuxième guerre mondiale, le chanko-nabe se répandit progressivement dans le peuple pour s’ajouter aux nombreuses recettes de hochepots déjà connus.
L’ingrédient le plus fréquemment utilisé est le poulet. Dans l’ancien temps, les sumos, superstitieux, abhorraient de consommer la chair d’animaux à quatre pattes. Il convient en effet de tenir toujours sur ses deux pieds en combat, car il suffit qu’une main effleure le sol être déclaré vaincu. Donc pas question de prendre le risque de ressembler aux bêtes à quatre pattes! Mais cette coutume n’a pas tenu et aujourd’hui les écuries de sumo servent d’autres viandes en abondance.
Toujours est-il que le poulet étant très bon marché au Japon, c’est le choix le plus commode. La chair du poulet entier est découpée, car les os feront la base du bouillon. Assaisonné de sauce de soja et quelques autres condiments au choix, il fait un excellent repas très simple. Si l’on ajoute des boulettes de chair de poulet hachée, les sucs produits iront encore enrichir la soupe.
Lorsque l’on mitonne une marmite à même la table, il est habituellement d’usage d’y jeter, à mesure de leur disparition et en les cueillant à l’aide de grandes baguettes, les ingrédients disposés dans un plat posé tout à côté. C’est le style sukiyaki. Mais lorsqu’on prépare un chanko-nabe, il convient de faire mitonner tous les ingrédients ensemble dans la marmite afin d’en faire ressortir toute la saveur. Pour un maximum de résultat, il faudra commencer par les ingrédients qui demandent le plus longtemps à cuire.
Une fois tous les ingrédients consommés, on passe à la phase suivante qui sera d’ajouter des nouilles udon ou du riz cuit et de tout nettoyer jusqu’au dernier brimborion, la soupe de plus en plus délectable et épaisse à mesure qu’on arrive au fond de la marmite. NIPONIA
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Pour cette livraison, notre chef sera Toishi Toshifumi, ancien lutteur de sumo. Il officie à présent au Kotogaume, un restaurant préparant une cuisine identique à celle qui se consomme dans les écuries de sumo. Il existe au demeurant de nombreux restaurants dans le voisinage du Ryogoku Kokugikan, le grand palais des tournois de sumo dans l’arrondissement Sumida à Tokyo. Mais la nourriture de chez Kotogaume est classée parmi les meilleures.
Site Web en japonais :
http://www13.plala.or.jp/kotogaume
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