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NIPPONIA No.26 15 septembre 2003
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Vivre au Japon
S’immerger dans la culture japonaise, dans une source thermale
Robert C. Neff
Texte : Takahashi Hidemine
Photos : Akagi Koichi
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Journaliste freelance, à cinquante-six ans Robert Neff a signé de nombreux articles sur la politique et l’économie. Il s’est récemment démis de son poste de rédacteur en chef au bureau de Tokyo du prestigieux magazine américain Business Week. Il est également l’auteur d’un étonnant ouvrage intitulé Sources thermales cachées du Japon. Il s’agit d’un guide en anglais des sources thermales les plus secrètes perdues au cœur des montagnes et des petits hameaux du Japon, autant de lieux dont la plupart même des Japonais n’ont jamais entendu parler.
« Tout le monde qui venait au Japon m’interrogeait sur les sources thermales de ce pays, si bien que j’ai décidé d’écrire un livre à leur sujet. Feuilletez les pages, et vous y découvrirez le plaisir de s’immerger dans des bains au cœur de la nature en abandonnant au monde tous ses soucis. Les rustiques stations thermales du Japon représentent assurément le paradis sur terre. »
Neff est né dans le Missouri aux USA. À treize ans, son père emmena sa famille au Japon où l’appelait son travail de missionnaire. Deux mois après son arrivée, la famille visita Hakone, la célèbre station thermale de la préfecture de Kanagawa. Ce fut le premier séjour des Neff dans une station thermale.
« Lorsque je pénétrai dans le vestiaire, je me trouvai nez à nez avec trois femmes nues. J’étais déconcerté, et horriblement embarrassé. Je me précipitai dehors aussi vite que je le pus. J’ignorais tout simplement que le bain était alors mixte… »
  
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Le livre de Neff, Sources thermales cachées du Japon (Éditions Tuttle Publishing Co., Inc.; 1995) présente quatre-vingt-sept stations thermales qu’il considère comme les meilleures.
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Contrairement à ce qui se fait de nos jours, en ces temps-là, nombreux étaient les stations thermales avec des bains mixtes.
Son émoi allait bientôt se transformer en fascination : l’école américaine où il était lycéen avait organisé conjointement avec un lycée de la préfecture de Shizuoka un voyage scolaire dans une petite station thermale de la préfecture. Là, tout le monde finit au bain avec les habitants locaux. La bâtisse des bains s’élevait solitaire au milieu des rizières.
« Immergées dans l’eau chaude, des familles entières d’habitants du lieu y papotaient paisiblement du quotidien, des travaux agricoles, et d’autres choses. C’était une petite réunion de voisins, très banale, mais dans le plus simple appareil. Chose impensable, aux États-Unis. Pour ma part, j’ai trouvé que cette ambiance constituait une des plus belles parts de la culture japonaise. »
Neff s’en retourna aux États-Unis pour s’inscrire dans une université. Son diplôme en poche, il n’eut de cesse qu’il ne fût retourné au Japon. Pour ce faire, il décida de devenir journaliste, estimant que cette profession lui donnerait pleinement l’occasion de travailler à l’étranger. En 1979, à trente-deux ans, il retrouvait le Japon comme correspondant à Tokyo du magazine Business Week.
« Le Japon semblait avoir changé du jour au lendemain. Des immeubles de béton et des distributeurs automatiques partout…Tous ces paysages ruraux que j’avais tant aimés semblaient avoir bel et bien disparu. Une partie cependant, était restée bien vivante… dans les stations thermales les plus reculées du pays. »
Il savait que quelque part, loin des sentiers battus, entourées par d’augustes bâtisses en bois et de vastes paysages, des sources thermales maintenaient en vie les traditions du vieux Japon. Lorsqu’il n’était pas retenu par son travail, Neff partait à la chasse aux sources thermales peu connues, visionnant les programmes de télévision, feuilletant page à page les magazines, sillonnant inlassablement le pays. Il s’adonna à cet exercice pendant une vingtaine d’années, ce qui lui permit de visiter plus de deux cents stations thermales.
« Si vous descendez dans un ryokan (auberge de style japonais) dans une station thermale loin des sentiers battus, vous mangerez de la nourriture locale et le patron ou la patronne vous accueillera à bras ouverts. Pour moi ce genre d’expérience a toujours été très précieux. »
Et le trésor qu’il trouve le plus précieux n’est autre que cette chaude atmosphère bon enfant et campagnarde du Japon du bon vieux temps.
Aujourd’hui, il habite avec son épouse Fumiko une maison agencée avec goût, dans la préfecture de Kanagawa. Chez lui, il porte le yukata, ce genre de kimono décontracté dont il est devenu un inconditionnel (le port du yukata est universel dans les stations thermales japonaises). « Je continuerai à visiter les sources thermales jusqu’à ma mort, ici au Japon. »
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Fumiko, l’épouse de Robert Neff, est également une grande fervente des sources thermales, elles constituent d’ailleurs le grand sujet de conversation entre les époux. Ce qui importe surtout pour Neff c’est l’atmosphère générale d’une source thermale, tandis que son épouse est très regardante sur la qualité de l’eau minérale. Ainsi, leurs stations thermales favorites ne sont pas nécessairement les mêmes.
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