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NIPPONIA No.22 15 septembre 2002
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La palette sonore de la musique japonaise traditionnelle
Les instruments musicaux ont chanté l’âme du Japon et exercé leur emprise sur les cœurs japonais durant des siècles.
Si les instruments à vent japonais ont plus de mille ans d’histoire, l’on a pu voir encore l’introduction d’un instrument à cordes aussi tard qu’au XVIIIe siècle. Mais tous ont contribué à l’enrichissement de la palette sonore de la musique japonaise qui a effectué son évolution de concert avec les arts de la scène traditionnels.
Texte : Kamisango Yûkô (Professeur Honoraire à l’Université Nationale des Beaux-Arts et de la Musique de Tokyo)
Crédits photographiques : (1) Université Nationale des Beaux-Arts et de la Musique de Tokyo (2) Bibliothèque Haga (3) Fondation du Mémorial Shimonaka
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Shamisen et plectre
Les trois cordes sont grattées avec un large plectre, parfaitement équilibré dans la main. Utilisé en Kabuki, bunraku et bien d’autres formes d’art de la scène. Longueur : environ 100 centimètres. (Photo: Sugawara Chiyoshi)
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À moins d’être un amateur éclairé, toute pièce de musique japonaise traditionnelle doit ressembler assez fort à une autre. Ce qui sera surtout le cas lorsque les exécutants, vêtus de leurs costumes traditionnels, jouent des instruments tels que le shamisen et le shakuhachi. Or, à l’heure actuelle, les experts classent la musique japonaise traditionnelle en cinquante, voire quatre-vingts genres.
Seuls quelques genres sont purement instrumentaux, car la grande majorité sont des chants avec accompagnement instrumental. Toute musique vocale ne possède qu’une seule ligne mélodique, même lorsqu’il y a plus d’un chanteur. Et la plupart des chants sont accompagnés par seulement un type d’instrument.
La musique japonaise traditionnelle se classifie suivant l’articulation du chanteur, le type d’instrument, et enfin, suivant le timbre (couleur tonale) à la fois de la voix et de l’instrument. Par exemple, si les récitatifs de ballades gidayu-bushi dans le bunraku, les chants de tokiwazu-bushi, dans le Kabuki, et les chants lyriques naga-uta se chantent tous avec accompagnement du shamisen, nous les classons dans des genres différents lorsque diffèrent les timbres de voix ou d’instruments. En d’autres termes, chaque genre possède son propre timbre vocal et instrumental.
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Partition de shamisen et chant pour la pièce intitulée Genkyoku Taishinshô, 1828. (Propriété des Archives musicales du Japon, Ueno Gakuen)
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Même ainsi, il existe très peu de différence de timbre entre un genre et le suivant. Et ceci est vrai tant pour la voix que pour les instruments. Dans nombre de cas, seul un expert en la matière pourra dire à quel genre ressortit le morceau entendu. Ce nonobstant, estimant que de telles différences, toutes subtiles puissent-elles être, ont leur importance, les musiciens veillent à ce qu’un timbre ne soit pas confondu ou n’aille pas se mêler à un autre. C’est ce souci qui explique une telle minutie de détail dans la classification des genres. Et cette préoccupation extrême pour les plus légères différences dans les timbres se matérialise plus concrètement, sinon plus fortement, dans la forme des instruments utilisés et le style de l’exécution qu’ils permettent.
Les instruments musicaux japonais traditionnels, tout comme les instruments d’autres pays, peuvent être groupés en trois grandes catégories : percussions, vents et cordes.
Prenons par exemple ce petit instrument de percussion qu’est le tambour kotsuzumi. La plupart des tambours japonais se battent à l’aide de deux bâtons, alors que le kotsuzumi se joue avec les doigts. Afin de maintenir en permanence un timbre égal, l’exécutant dans les moments d’inactivité ausculte et règle discrètement le timbre en resserrant ou desserrant les cordelettes tendant les peaux sur le fût du petit tambour. Vous les verrez ainsi parfois souffler sur la peau pour l’humidifier légèrement si l’air est trop sec, comme c’est le cas en hiver par exemple, et obtenir une sonorité idéale.
Un instrument à vent, à présent : la flûte de bambou appelée shino-bue. Lorsqu’il accompagne un chanteur dans une pièce de Kabuki, le flûtiste choisira dans la gamme des douze shino-bue s’offrant à lui celle qui présente le registre de tonalités souhaitées. Dans les festivals locaux, on recourra généralement à deux ou trois shino-bue pour la même raison. Ces exemples montrent combien les musiciens se donnent de peine afin de produire le timbre exact exigé par la musique interprétée.
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