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NIPPONIA No.28 15 mars, 2004
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Bon Appétit!

La Culture japonaise en cuisine

Shiruko

La soupe de haricots sucrés
si revigorante en hiver

Texte : Otani Hiromi, journaliste gastronome
Photos : Kono Toshihiko

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Avant plan, droite : Cette soupe shiruko avec des azuki entiers est appelée zenzai dans le Japon de l’Ouest.
Arrière-plan gauche : Pour cette soupe shiruko, les haricots ont été écrasés au passe-purée pour les débarrasser de leur peau.
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Le shiruko est une soupe préparée avec les haricots rouges azuki (Phaseolus mungo) bouillis dans un mélange d’eau et de sucre, avec des pièces de mochi (gâteau de riz glutineux) grillées flottant dans le bol. Servie chaude, cette soupe est un des plats traditionnels sucrés les plus répandus dans tout le Japon. Il constitue un repas léger, un matefaim pris entre déjeuner et dîner.
Il se présente sous deux variantes : avec les haricots entiers, ou bien égouttés après cuisson et réduits en purée au presse-purée pour leur enlever la peau. Dans le Japon de l’Ouest, cette première version est souvent appelée zenzai. Le shiruko se mange tout au long de l’année, mais comme il est servi brûlant, on le considère comme une gâterie particulièrement bienvenue durant les froids mois d’hiver.
Le haricot azuki fut introduit de Chine au Japon. Les archéologues en ont découvert des traces sur des sites vieux de deux mille ans, ce qui nous permet d’inférer que les Japonais pratiquent cette culture au moins depuis ce temps. Un ancien manuscrit du VIe ou VIIe siècle, le Keiso Saijiki, nous explique que les Chinois consommaient l’azuki le jour du solstice d’hiver, afin de détourner le mauvais œil de leur personne. Peu après, la coutume semble avoir abordé le Japon, où il ne fallut pas longtemps pour qu’il devînt courant de consommer l’azuki dans les occasions spéciales et finalement à d’autres moments de l’année également, tels que fêtes et cérémonies.
Mais ce ne fut que beaucoup plus tard qu’il devint courant d’utiliser l’azuki dans des recettes de mets sucrés, c’est-à-dire après que le paysan japonais ait commencé à produire de grandes quantités de sucre vers la fin du XVIIe siècle. Dans un ouvrage terminé en 1852, le Morisada Manko, nous apprenons ceci : « À Edo (Tokyo) les peaux d’azuki sont enlevées, et les haricots sont bouillis avec du sucre blanc ou du sucre non raffiné et une tranche de gâteau de riz mochi. Cette soupe est appelée shiruko. Dans la région de Kyoto-Osaka, cette soupe avec la peau des haricots ôtée s’appelle shiruko ou koshian-no-zenzai. » Ceci montre bien que le shiruko se dégustait dans tout le Japon au moins aussi loin que dans la moitié du XIXe siècle, et que ce fut vers cette époque qu’il apparut des variantes dotées de noms différents.
Sucre et azuki s’achètent partout et ne coûtent vraiment pas cher, ce qui explique que le shiruko devint un matefaim traditionnel très populaire qui se prépare également chez soi. Mais sa préparation étant quelque peu compliquée et demandant du temps, vers le milieu du XIXe siècle on le vendait déjà en soupe toute prête à emporter chez soi pour la consommation. Jadis, il se dégustait dans des salons de thé appelés kanmi-dokoro, l’équivalent des cafés d’aujourd’hui. Proposé également par le marchand ambulant qui le puisait à même la boîte carrée qu’il transportait sur son dos, le shiruko se vendait particulièrement bien le soir, la fraîcheur venant.
Nous voyons donc que le shiruko est très populaire depuis longtemps. Aussi, de nos jours est-il même proposé en une foule de conditionnements prêts à la consommation. Avec certains, il suffit de verser un sachet dans un bol et d’ajouter de l’eau, pour d’autres d’en réchauffer le contenu.
Mais si vous décidez de confectionner vous-même votre shiruko, il vous faudra retrousser les manches et vous plier à un certain nombre de manipulations qui demandent pas mal de temps. Il faut savoir d’abord que l’azuki contient du tanin, qui donnera un goût âpre et pas trop agréable à votre soupe si vous omettez de le retirer. Après avoir fait bouillir les haricots suffisamment longtemps, les égoutter et rincer convenablement. Ajouter de l’eau fraîche aux azuki bouillis et retirer l’écume se présentant à la surface. Ensuite, faire repartir une nouvelle ébullition et continuer à écumer la surface du liquide de cuisson. Certes, cela prend du temps, mais le résultat est garanti : la soupe sera délicieuse.
Avant de servir, nous ajouterons du mochi grillé. La fragrance du mochi grillé se marie merveilleusement à la saveur des haricots. De plus il ajoute sa texture satinée, quoique solide, au liquide de la soupe, mariage de deux éléments constituant une expérience gastronomique intéressante. Et aussi, l’ajout de mochi confère du corps à la soupe, la rendant idéalement nourrissante : le snack idéal en somme! Même si sa préparation prend du temps, je ne puis que recommander chaleureusement ce plat traditionnel. NIPONIA
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Notre chef pour la présente livraison n’est autre que Tomita Keiko, patronne à l’enseigne de Kinozen, une maison de thé traditionnelle. Cet établissement est depuis de longues années un des endroits les plus populaires du quartier de Kagurazaka à Tokyo, au point que les médias d’outre-mer l’ont déjà présenté maintes fois. Il n’est pas rare de remarquer des étrangers parmi les consommateurs.
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