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NIPPONIA No.28 15 mars, 2004
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4 Wonders of Japan
By Mick Corliss
Né dans l’État d’Oregon, États-Unis. Après un passage comme journaliste au quotidien de langue anglaise Japan Times, Corliss s’installa écrivain et traducteur freelance en 2002.
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En haut : Au Restaurant Komazawa vous pourrez prendre votre repas avec votre animal de compagnie.
En haut à droite : Hyposodé, hyposaccharé, un repas traditionnel de Nouvel An pour chiens.
En bas à droite : Les habits dans la vitrine de ce magasin spécialisé en animaux de compagnie sont si joliment coupés qu’on jurerait de la layette.
Ci-dessus : Le Meowlingual de Takara analyse et retraduit l’empreinte vocale des miaulements, ronrons et autres émissions vocales des chats. Le micro capte la voix du chat et affiche sa signification en langage humain sur le petit écran à cristaux liquides.
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Les Japonais et leurs animaux de
compagnie, ou qui garde qui ?
Texte : Mick Corliss, Photos : Omori Hiroyuki, Coopération : Komazawa Restaurant
Autres coopérations photographies : Takara Co., Ltd. et Japan Pet Drugs Co., Ltd.

Le Japon est le paradis de l’animal de compagnie. Les toutous à la promenade dans les parcs et les rues calmes des quartiers résidentiels portent gilet élégamment coupé, arborent plus souvent qu’à leur tour des colliers griffés des grands selliers pour tirer en râlant sur des laisses chères, trop chères. Un coup d’œil à la vitrine des magasins animaliers me fait découvrir des chiens et chats se vautrant dans le luxe, avec repas de gourmet à la clé et garde-robe se réglant sur les saisons. Et je passe sur une panoplie d’équipements de loisir pour éloigner la morosité et leur dérider le museau.
Il existe également des sources thermales pour animaux de compagnie où les très chers viennent se débarrasser de leur stress, des salons de beauté, également, proposant massages, aromathérapie et masques de beauté à l’argile pour clébards. On trouve aussi un système permettant aux propriétaires horriblement esseulés de vérifier sur leur portable ou l’ordinateur du bureau si tout se passe bien pour le très cher demeuré seul dans l’appartement.
« Nous sommes dans un pays où les gens antropomorphisent leurs bêtes de compagnie » me faisait remarquer un ami australien.
Le nombre de boutiques “cynophiles” est en augmentation dans Tokyo. Le Restaurant Komazawa récemment ouvert dans l’arrondissement de Setagaya, Tokyo, n’est qu’un exemple. À certaines heures, la moitié des chiens y ont leur client en laisse…non, le contraire.
« Jamais nous ne les appelons ’animaux de compagnie’, non, non! le client n’apprécierait pas! Pour un propriétaire, ce sont plus que des ’animaux de compagnie’, et même bien davantage parfois qu’un enfant! » susurre benoîtement le manager Ishiwata Etsuro.
Mais les animaux de compagnie n’ont pas toujours été aussi haut en cour.
« Il fut un temps où si l’on gardait des chiens ou des chats chez soi c’était pour deux raisons bien pratiques : dissuader les voleurs ou s’occuper des souris, ou les deux ensemble », martèle le vétérinaire Nakayama Masahiko. En fait, une des insultes favorites de la langue japonaise n’est-elle pas “chikusho” , qui signifie “la bête”, dans le sens de “bête immonde de l’enfer bouddhique”? fait remarquer finement Nakayama. Ce qui indique assez le peu d’estime dans laquelle on tenait jadis nos amis à quatre pattes. Mais les temps ont bien changé. Désormais, chiens et chats s’élèvent au cœur même du foyer.
« Aujourd’hui, l’animal domestique s’est vu investir du rôle d’animal compagnon, ou compagnon animal », précise Nakayama. Toutefois, une exposition intensive et passionnelle aux animaux n’est pas que sérénité et béatitude. Se blottir avec son toutou ou son minou au lit peut aussi occasionner quelques problèmes.
« Je n’arrive toujours pas à comprendre les élans qui poussent quelqu’un à couvrir son chien de bisous. Enfant, c’est la première défense que m’intima mon père — qui n’était pas bactériologiste pour rien! » raconte John Williams, un Anglais. Tout récemment, des experts ont signalé un bond des infections parasitaires chez les humains, rançon non voulue des témoignages d’affection débridée manifestés aux chiens.
Tout ceci conduit à la conclusion qu’à un moment de leur histoire un saut qualitatif a fait des animaux de compagnie, disons… quelque chose de plus que des animaux de compagnie. Si j’osais émettre une hypothèse, je dirais que la mutation spectaculaire du paysage démographique japonais — qui galope à bride abattue vers une société grisonnante avec un taux de natalité en chute libre — est en train de creuser une niche émotionnelle, un immense trou noir affectif comblé par les animaux, mais sans doute à leur corps défendant. Tout se passe comme si les rôles du maître et de son animal de compagnie s’étaient inversés, et que c’est à présent « la queue qui frétille du chien. »
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