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NIPPONIA No.22 15 septembre 2002
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Que lui arrive-t-il?Dô-age
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L’équipe de base-ball professionnel victorieuse entoure aussitôt son entraîneur et l’envoie en l’air pour donner le coup d’envoi des célébrations de leur belle victoire. Au Japon “…à vaincre sans dô-age l’on triomphe sans gloire”, pourrait-on dire en parodiant la célèbre tirade.
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Page précédente : Ce jeune homme s’est aligné dans une course de relais inter-universitaire. Son équipe a gagné, c’est donc le moment de l’envoyer valser dans un vertigineux dô-age.

En haut : Un autre étudiant bénéficiant du même traitement après constat par ses condisciples de passage fructueux de ses examens d’entrée. Spectacle assez fréquent au printemps dans les universités japonaises.
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Une vigoureuse propulsion dans les airs pour un moment de colossale liesse
Texte : Furui Asako, Crédits photographiques : Yomiuri Shimbun
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Aussitôt le match terminé… et remporté, tous les membres de l’équipe victorieuse entourent leur manager, le saisissent sans ménagement pour le soulever à l’unisson et le lancer dans les airs, le plus haut possible, en vociférant de plus belle. Dans sa phase ascendante, le manager est supposé arborer un large sourire (même s’il n’est pas très rassuré) et étend les bras au-dessus de la tête en un vigoureux banzaï! signe absolu de victoire. Vous assisterez souvent à cette scène à l’issue d’une rencontre de base-ball professionnel, dont plus de la moitié des Japonais sont fous. Récemment, la coutume s’est étendue au jeune marié à qui l’on fait subir le même sort, et parfois aussi à un étudiant lorsque les gens autour de lui découvrent en lisant les résultats affichés qu’il a passé avec succès les examens d’entrée.
Cet acte de projeter triomphalement une personne dans les airs s’appelle le dô-age. Il est expression de l’exubérance la plus folle, une manière comme une autre pour un groupe social de partager l’enthousiasme et l’exaltation de voir l’un des leurs signer une grande victoire ou réaliser une action d’éclat particulièrement impressionnante. Chaque personne du groupe se rassemble autour de l’individu à honorer. On le soulève en position horizontale, et l’envoie valser par-dessus les têtes. La projection sera unique, ou se répétera trois, cinq, voire même dix fois, cela s’est vu.
L’origine de cette coutume est loin d’être claire. Si l’on en croit une théorie de l’anthropologie structuraliste, “…le projet exprimé par le dô-age serait de maintenir les pieds de l’individu ovationné hors de contact avec la terre, pour une assimilation au divin consacrant la sainteté de sa personne”. Aujourd’hui encore, dans différentes parties du pays, le dô-age se pratique lors de festivals religieux. Par exemple la ville de Muika-machi, Préfecture de Niigata, organise des réjouissances de Nouvel-An appelées Muko no dô-age (monter le marié). Ici ce sont les hommes mariés au cours de l’année précédente qui se font empoigner pour être projetés dans les airs. Jadis, le dô-age se pratiquait dans une intention de farce, parfois cruelle. Ainsi, un roman du XVIIe décrit une scène dans laquelle les détenus d’une prison “accueillent” un nouveau en l’envoyant en l’air… pour le laisser retomber joyeusement sur le sol : pratiquement l’estrapade !
Mais l’impression de se sentir projeter dans les airs est formidable. Si vous êtes curieux de l’expérimenter, un moyen est de pratiquer, au Japon, un sport… et d’y briller, se lancer dans une activité académique… et y exceller, et surtout de vous assurer que des amis fiables seront autour de vous lorsque votre succès deviendra patent. Avant que vous ne vous en rendiez compte, vous vous retrouverez projeté dans les airs. Mais ils seront prudents, donc ne vous en faites pas trop.
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