Web Japan > Les tendances au Japon > Tech & vie > Technologie d’isolation sismique pour la protection du Musée national d'art occidental, site classé au patrimoine mondial
Le Musée national d'art occidental est un site du patrimoine mondial qui bénéficie d’une technologie d’isolation sismique
Situé dans le parc d’Ueno à Tokyo, le bâtiment principal du Musée national d'art occidental a été classé au patrimoine mondial de l'UNESCO en 2016 en tant que site de « L’œuvre architecturale de Le Corbusier, une contribution exceptionnelle au mouvement moderne ». Le bâtiment a été construit en 1959, avant le développement des technologies architecturales visant à réduire l'impact des séismes. Il a ensuite été doté d'excellents équipements pour lutter contre les tremblements de terre, contribuant ainsi à le protéger des dégâts. Bien que le séisme de 2011 de la côte Pacifique du Tohoku ait provoqué d'importants dégâts dans l'est du Japon, le bâtiment du musée n'a pratiquement pas été touché. Les œuvres d'art précieuses qui s'y trouvaient n’ont quasiment pas été abîmées.
Le bâtiment, qui était déjà debout depuis 52 ans au moment du séisme, a été frappé par des secousses allant de 5 faible à 5 fort sur l'échelle d'intensité sismique japonaise. Il n’a subi que très peu de dégâts en dépit de ces fortes secousses, car la technologie d’isolation sismique a permis de réduire considérablement l’oscillation du bâtiment.
La technologie d’isolation sismique absorbe les secousses et empêche les bâtiments de trembler
Grâce à l'isolation sismique, le bâtiment est soutenu par des dispositifs (les parties rouges sur l'image) en caoutchouc laminé ou autres matériaux, qui empêchent les vibrations alentour d'atteindre le bâtiment.
Quel type de technologie est l'isolation sismique ?
Il existe trois types de méthodes de protection des bâtiments contre les séismes : la résistance aux séismes, le contrôle des vibrations et l'isolation sismique.
La résistance aux séismes implique de renforcer le bâtiment lui-même afin qu'il ne soit pas détruit en cas de tremblement de terre.
Le contrôle des vibrations consiste à incorporer des dispositifs qui absorbent celles-ci dans la structure du bâtiment, ce qui évite qu’il soit endommagé par les séismes.
L'isolation sismique, quant à elle, consiste à installer des dispositifs d'isolation sismique sous les fondations du bâtiment plutôt qu'à l'intérieur de celui-ci. Cela empêche les vibrations d'atteindre le bâtiment. Même si la zone environnante est secouée de droite à gauche, les dispositifs d'isolation sismique agissent comme un coussin pour empêcher les vibrations d'atteindre le bâtiment. Par conséquent, le bâtiment est moins susceptible d'être détruit par le séisme. Cette méthode n’empêche pas complètement le bâtiment de trembler, mais permet de réduire les vibrations du séisme. Le bâtiment ne fait alors que de lents mouvements d’allers-retours.
Le mécanisme d'absorption des vibrations
Les dispositifs d’isolation sismique sont fabriqués à partir de matériaux tels que le caoutchouc laminé, obtenu en empilant des feuilles de caoutchouc et de métal les unes sur les autres, comme un mille-feuille. Même si la zone environnante tremble violemment du fait du séisme, les dispositifs d’isolation sismique se déforment et absorbent les vibrations horizontales, ce qui réduit l’effet de celles-ci sur le bâtiment.
La technologie d'isolation sismique ne s'est pas beaucoup répandue à l'extérieur du Japon, mais elle a rapidement gagné en popularité dans le pays après le grand tremblement de terre de Hanshin en 1995. La ville de Kobe a subi d'importants dégâts, mais certains bâtiments construits avec une isolation sismique n'ont pas du tout été endommagés. L'intérêt pour cette technologie a alors augmenté. De même, les bâtiments équipé d’une isolation sismique ont subi peu de dégâts lors du séisme du Tohoku, ce qui démontre les capacités avancées de cette technologie.
Nombre cumulé de bâtiments avec isolation sismique (grands bâtiments), calculé par la Société japonaise d’isolation sismique en tenant compte principalement des membres de l’organisation (graphique fourni par la Société japonaise d’isolation sismique)
Réaménagement de l'isolation sismique : Fournir une isolation sismique dans les bâtiments existants
Après le grand tremblement de terre de Hanshin, le Musée national d'art occidental a été examiné pour sa résistance aux séismes. Cette enquête a révélé que le bâtiment présentait une résistance aux séismes plus de deux fois inférieure à la résistance requise par les normes en vigueur au Japon à l’époque.
Le Musée national d'art occidental est un bâtiment de grande valeur conçu par Le Corbusier, l'un des plus grands architectes du 20e siècle. Il abrite et expose de nombreuses peintures et sculptures occidentales précieuses datant de la Renaissance au début du 20e siècle, notamment les Nymphéas de Monet et La Gitane pensive de Courbet. De ce fait, il était essentiel de rénover le bâtiment pour améliorer sa résistance aux séismes. À l’époque, il était courant d’ajouter des murs antisismiques et d’augmenter l’épaisseur des piliers et des poutres afin d’améliorer la résistance des bâtiments aux séismes. Cependant, ce type de travaux aurait gâché la conception originale de Le Corbusier. Le seul moyen d’améliorer la résistance du musée aux tremblements de terre tout en préservant sa valeur culturelle était d’utiliser la technologie d’isolation sismique.
Cependant, il n'est pas facile d'intégrer l'isolation sismique dans un bâtiment existant tel que le Musée national d'art occidental.
Afin de préserver la conception et les fonctions du bâtiment, ce processus nécessite de retravailler les fondations qui supportent le bâtiment et d’en remplacer certaines par des dispositifs d’isolation sismique alors que le bâtiment est déjà posé dessus. Cela revient à changer les pieds d’une table avec de nombreux objets placés dessus.
Cette technologie avancée est appelée « réaménagement de l'isolation sismique ». Cette technologie est utilisée pour protéger les bâtiments qui ont été construits avant l’apparition des techniques d'isolation sismique. Elle a été mise en œuvre pour la première fois au Japon au Musée national d'art occidental. Elle a ensuite été utilisée pour d’autres bâtiments, tels que la tour emblématique d’Osaka Tsutenkaku et le bâtiment plus petit de la tour Japan Post Tower, situé en face de la gare de Tokyo et à l’intérieur duquel est conservé une partie de l’ancien bureau de poste central de Tokyo.
Le processus nécessite de soulever tout le bâtiment ou de creuser la zone environnante pour pouvoir travailler sur les fondations. Cela implique donc une technologie de pointe et des coûts importants.
Classé site du patrimoine mondial après des travaux de construction nécessitant une technologie avancée
Le Musée national d'art occidental présente une structure complexe avec un atrium en son centre et certaines zones avec des sous-sols. Pour cette raison, le bâtiment a été inspecté avant la construction en utilisant des techniques avancées afin de vérifier que toute la structure pouvait tenir après les travaux de rénovation.
Les travaux de construction ont consisté à installer des dispositifs d'isolation sismique sous les fondations existantes. Plus précisément, les ouvriers ont d’abord retiré le revêtement de sol autour des fondations du bâtiment, puis creusé autour de celles-ci afin d’y installer des poteaux pour soutenir temporairement le bâtiment à la place des fondations. Pour cela, les poteaux ont été coupés en tranches qui ont été insérées unes par unes sous le sol. Les poteaux ont dû être coupés, car il y avait peu d'espace en sous-sol et les ouvriers n'étaient pas en mesure d'utiliser une machine pour installer des poteaux. Après ça, les ouvriers ont coupé la partie inférieure des fondations et ont installé des dispositifs d’isolation sismique. Pour finir, ils ont découpé et enlevé les poteaux, puis ont restauré le sol dans son état d'origine.
Au total, 49 dispositifs d’isolation sismique ont été nécessaires pour l’ensemble du bâtiment. Chaque dispositif porte entre 140 et 300 tonnes environ. Ils peuvent supporter le poids du musée et résister à la force des tremblements de terre, et cela même lorsque le bâtiment a bougé de 40 centimètres horizontalement et que le caoutchouc laminé s’est déformé en diagonale.
Les travaux ont commencé en mai 1996 et ont duré près de deux ans. En avril 1998, le musée a rouvert ses portes après des travaux de rénovation réussis pour maintenir le bâtiment en sécurité et le protéger des séismes.
Lors du tremblement de terre du Tohoku en 2011, le terrain du Musée national d'art occidental a subi des secousses avec une accélération maximale de 265 cm/s2. Les dispositifs d'isolation sismique ont absorbé les vibrations, réduisant l'accélération maximale des tremblements à l'intérieur du bâtiment à 100 cm/s2, ce qui a permis au musée de ne subir pratiquement aucun dégât.
Plus tard, en 2016, le musée a été classé site du patrimoine mondial de l'UNESCO en tant que site de « L’œuvre architecturale de Le Corbusier, une contribution exceptionnelle au mouvement moderne ».