Reportage spécial*
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Lorsquon sessaie à la méditation, des pensées parasites et erratiques, aussi simples que des « Suffit comme ça! » et Non, je dois maccrocher
» viennent perturber le déroulement de la séance.
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Le Portail Nanso-mon du Temple Myoshin-ji. La session de méditation zen démarre très précisément au franchissement de ce portail.
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Jai eu un aperçu du zen cette ineffable tradition spirituelle qui a exercé son influence incommensurable sur la culture japonaise au cours des siècles à Kyoto, le lieu idéal. Ce ne fut quà mon arrivée que je me trouvai informé que le Myoshin-ji est le cours de « zen populaire » le plus ardu et le plus strict ouvert au grand public. Ce qui ne fit que renforcer mes attentes. Engoncé dans mon samue, le vêtement obligatoire pour laccomplissement des tâches domestiques, je me dirigeai vers le cours dorientation. Là linstructeur en chef pour le week-end, Ishida Shingyo, prodigue dans un chaleureux accent du Kansai son enseignement à une douzaine de personnes, toutes débutantes. Il nous montre la position de base, assis à genoux fesses sur les talons, et la respiration. Comme sil sagissait de la chose la plus banale qui soit, il annonce le programme : « Ce soir nous allons méditer toute la nuit
jusquà laube », non sans terminer sa phrase sur un malicieux sourire. Fort heureusement ce nétait là quune saillie dhumour zen monacal.
Nous voici bientôt en route pour la salle de méditation. Débutants et vétérans sont à présent assis en méditation silencieuse. Yeux mi-clos, je lutte pour épurer mon esprit de toute pensée superflue. Mais opiniâtres, elles nen continuent pas moins à maccoster. Il ne faut que quelques minutes pour que je ne sente plus mes jambes endolories. Finalement je parviens à maligner grosso modo trois ou quatre petites séances de méditation de trente minutes.
Au cours de la méditation, le moine fait sa ronde, il veille, sa latte à la main. « Paf! » Le claquement sec de la latte abattue sur une épaule de distrait retentit dans toute la salle. Le fameux keisaku est entré en action. Cette latte doit aider les pratiquants à surmonter leur fatigue ou à corriger lécroulement progressif et inéluctable de leur attitude. Parfois, la claque est appliquée à la demande du méditant, mais le plus souvent non. Me figurant quune bonne claque conférerait davantage de vécu à mon expérience zen, jen sollicite bientôt une! Bien mal men prend car, loin de me purger des pensées abstraites, voilà que le coup me fait rouler dans un tourbillon de pensées. Ce soir-là, le prieur fait sa visite surprise dans la salle de méditation. Il nous exhortera à déployer tous nos efforts pour rigoureusement avoir conscience de notre moi véritable à tout moment. À 10 heures du soir, extinction des feux. Mon espace de repos ne fait pas plus dun tatami. Je me coule heureux dans mon futon.

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Ci-dessus : Après administration par le moine dun solide coup de latte de bois, le keisaku, sur lépaule du méditant pour ramener à la salutaire concentration lesprit battant la campagne, les deux protagonistes sinclinent profondément pour exprimer leur respect mutuel.
À droite : Certes, la latte keisaku est utilisée uniquement comme encouragement, mais tout de même
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