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NIPPONIA No.21 15 Juin 2002
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Vivre au Japon
Il court au Japon, et c’est pour la Médaille d’Or
Eric Wainaina
Texte : Takahashi Hidemine,
Photos : Okamura Masahiro
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Eric Wainaina au bureau.
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“C’est quand je cours que je suis le plus heureux. C’est quand je ne peux pas courir, à cause d’une blessure ou d’un rhume, que je suis le plus malheureux! Je me sens bien lorsque je cours.”
Eric Wainaina expose, en japonais, les deux axiomes de sa philosophie : voilà manifestement un homme heureux dans la vie. Il a couru le marathon pour le Kenya aux Jeux Olympiques d’Atlanta de 1996, et à ceux de Sydney, en 2000. Il décrocha le Bronze, et ensuite l’Argent. On aura compris qu’on se trouve devant un des meilleurs marathoniste au monde. Il travaille pour le fabricant de caméras Konica, section Affaires Générales, et est naturellement membre de l’équipe athlétique de la maison. “Je me considère pratiquement japonais.”
Lorsque Eric, né dans la ville de Nyahururu, au Kenya, vint au Japon en 1993, il n’avait que dix-neuf ans (il en a actuellement vingt-huit). Lycéen au Kenya, il était déjà athlète de fond et il ne fallut pas longtemps pour qu’il attire l’attention du club Konica. C’est ce qui l’amena au Japon.
“Les Kenyans ne s’intéressent pas vraiment au marathon. À commencer par moi d’ailleurs. Oui, les gens me félicitaient parce que je courais si vite, mais ça ne me faisait ni chaud ni froid, c’était normal. Mais je connaissais un autre coureur kenyan, un peu plus âgé que moi, qui s’était fait un grand nom au Japon — et c’est comme cela que je me suis dit que je pourrais très bien moi aussi faire mon chemin dans ce pays au pas de course.”
À l’époque, Eric ignorait pratiquement tout du Japon. “Les films et les programmes télé que je voyais me montraient invariablement un Japon de samouraïs. Je pensais réellement que tout le monde vivait dans des maisons en bois et en papier et que les hommes avaient le sommet du crâne rasé avec seulement un petit catogan!”
“À peine arrivé au Japon, on m’envoya dans un camp d’athlétisme de la préfecture de Chiba. Holàlà! Ce choc quand on nous a servi du sashimi dans le pavillon où nous logions! Je n’avais jamais mangé de poisson cru de ma vie, vous pensez! Et lorsque je vis tout le monde flâner en kimono, que j’appris plus tard s’appeler yukata, je me dis que j’étais vraiment tombé au pays des samouraïs!” Réflexion rétrospective qui lui amène un sourire.
Mais il ne lui fallut pas longtemps pour qu’il s’habitue à cette culture différente, et moins encore pour déjà en être amoureux. L’année suivante, il remporta le Marathon de Hokkaido, au nord du Japon. Ce fut là que l’équipe d’athlétisme Konica prit toute la mesure de ses potentialités.
Le voilà à présent tellement accro de la nourriture japonaise, qu’il en emporta avec lui udon et miso aux Jeux Olympiques. “J’aime énormément le Japon. D’abord pour une grande chose : les gens pratiquent un respect mutuel. Oh, ce n’est pas qu’ils ne se fâchent pas quelquefois, mais fondamentalement, ils sont gentils les uns pour les autres. On aime son semblable, on le respecte. Exemple : vous entrez dans un magasin, vous ressortez sans rien acheter, mais vous entendrez tinter dans votre dos “Merci de votre visite!” Au Kenya, vous pourrez toujours courir! Quoi que fasse un Japonais, il essayera toujours de le faire le mieux qu’il peut. Pour moi c’est clair, le Japon est le meilleur endroit où je puisse me trouver !”
Il habite en célibataire dans le foyer des employés de Konica à Hachioji, Tokyo. À six heures du matin, il part jogger pour une heure. Après cela, c’est le travail. Le bureau qui l’emploie traite divers aspects des opérations de la société, y compris la gestion du versement des salaires pour l’ensemble des employés de la société. À trois heures, le voici à nouveau sur la piste, cette fois dans un stade municipal. Pendant ses loisirs, il y a de fortes chances pour qu’on le trouve en train de donner des conseils dans quelque école primaire ou lycée des environs sur la manière de gérer l’effort en course.
Au bureau, tout le monde l’appelle par le petit nom affectueux de Wai-san, et dès qu’il met le pied sur une piste, les gens du coin lui demandent quand est son prochain marathon. Lorsqu’il revint des Olympiades avec sa médaille d’argent, tant de gens voulurent lui serrer la main qu’il garda longtemps une épaule endolorie. Certes, Eric est héros dans sa cité d’adoption Hachioji.
“Jouir pleinement de chaque moment, c’est cela qui est capital. Quand vous courrez le marathon, vous pouvez être assailli par des fatigues colossales, mais si vous gardez le moral, vous vous en tirez parfaitement bien. On peut persévérer et s’accrocher dans tout ce qu’on fait, pourvu qu’on soit convaincu que ce qu’on fait c’est par plaisir.”
Eric répète à qui veut l’entendre que son mot japonais favori est “akiramenai”, “Ne jamais renoncer!” Son prochain objectif pour les Jeux Olympiques est logiquement de revenir médaillé d’or. Ah oui! Et aussi de prendre de vrais cours de japonais…
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Moment détente au foyer de la société. Wainaina travaille pour un fabricant de caméras, rien d’étonnant donc à ce qu’il aime prendre des photos.
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Le 10 février dernier Wainaina remporta le Marathon International de Tokyo, 2002, améliorant son propre record qu’il porta à… 2 heures, 8 minutes, et 43 secondes. (Avec l’aimable autorisation de la Société Konica pour les deux photos de cette page)
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